Les cascades de sang de l'Antarctique. Blood Falls s'écoule depuis l'extrémité du glacier Taylor, en Antarctique La tente, située en bas à gauche de l'image, donne une idée de l'échelle de ce phénomène impressionnant. | © National Science Foundation / Peter Rejcek

Les cascades de sang de l'Antarctique : Un phénomène naturel fascinant

 

Les cascades de sang de l'Antarctique sont un phénomène naturel étonnant qui a suscité l'intérêt et la curiosité des scientifiques du monde entier. Ces cascades, qui semblent déverser un liquide rouge vif sur la glace immaculée, ont été découvertes il y a plusieurs années et continuent de fasciner les chercheurs.

Cet étrange gisement rougeâtre est observé la première fois en 1911 par le géologue australien Thomas Griffith Taylor dans les vallées sèches de McMurdo, en terre Victoria, dans l'Antarctique oriental. L'origine de l'expression métaphorique Blood Falls utilisée dans le monde anglophone pour décrire cette chute d'eau à la teinte rougeâtre, communément appelées « cascades de sang » en français, demeure inconnue.

Photographie des cascades de sang prise lors d'un vol au-dessus de l'Antarctique en novembre 2013.

Photographie des cascades de sang prise lors d'un vol au-dessus de l'Antarctique en novembre 2013. Cette vallée est l'un des endroits les plus reculés du monde. | © Michael Studinger / NASA.

Visuellement saisissantes, ces couleurs créent l'illusion d'un écoulement de sang provenant du glacier. Cet article se propose d'explorer les origines potentielles de ces cascades, les recherches en cours et les théories qui tentent d'élucider ce phénomène intrigant.

Théories et recherches en cours à propos des « cascades de sang »

Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer les cascades de sang de l'Antarctique. Certains scientifiques suggèrent que la présence de fer dans les eaux souterraines de l'Antarctique réagit avec l'oxygène de l'air, créant ainsi une couleur rouge. Cette eau provient d'un lac salé sous-glaciaire, connu sous le nom de lac Vida, qui est emprisonné sous une épaisse couche de glace depuis des milliers d'années. Lorsque cette eau riche en fer entre en contact avec l'air, une réaction d'oxydation se produit, donnant ainsi cette teinte rouge caractéristique.

Représentation schématique en coupe transversale de Blood Falls.

Représentation schématique en coupe transversale de Blood Falls expliquant comment les communautés microbiennes sous-glaciaires ont réussi à survivre pendant un million d'années dans des conditions de froid, d'obscurité et d'absence d'oxygène. Ces micro-organismes prospèrent dans les eaux saumâtres situées sous le glacier Taylor. | © Zina Deretsky / US National Science foundation.

D'autres théories avancent que des processus microbiologiques ou géochimiques spécifiques sont responsables de la coloration des cascades de sang de l'Antarctique. Selon les recherches actuelles, la teinte rouge des cascades provient de la présence d'une algue microscopique appelée Chlamydomonas nivalis. Cette algue, dotée d'un pigment rouge, requiert de la lumière, des nutriments et de l'eau liquide pour se développer. Une fois que ces conditions idéales sont réunies, les cellules de l'algue se divisent et se multiplient rapidement, entraînant une prolifération et une coloration de la neige avoisinante. Au moment de la fonte de la neige, l'algue est libérée et se retrouve dans des flaques d'eau ou des cours d'eau à proximité. Cela crée l'illusion d'une véritable « cascade de sang ».

Perspectives futures et questions en suspens

Le glacier Taylor se distingue des autres glaciers de l'Antarctique par le fait qu'il n'est pas entièrement gelé jusqu'au substrat rocheux. Cette particularité est probablement due à la présence de sels concentrés résultant de la cristallisation de l'eau de mer ancienne emprisonnée en dessous. Cette caractéristique atypique offre aux scientifiques une opportunité exceptionnelle d'étudier la vie microbienne souterraine dans des conditions extrêmes, sans avoir à effectuer des forages profonds dans la calotte polaire, ce qui présenterait un risque de contamination pour cet environnement fragile et préservé.

Les Blood Falls, exemple fascinant de la diversité des phénomènes naturels sur notre planète, font l'objet d'études scientifiques approfondies visant à mieux comprendre les processus géochimiques et microbiologiques qui s'y déroulent. Des expéditions sur le terrain, des analyses chimiques et des modélisations informatiques sont menées pour approfondir nos connaissances sur cet écosystème unique. Les chercheurs espèrent également découvrir si d'autres organismes peuvent survivre dans ces environnements extrêmes.

Blood Falls, Terre de Victoria, Antarctique, le 18 novembre 2004.

Blood Falls, Terre de Victoria, Antarctique, le 18 novembre 2004. | © es0teric.

L'étude de ces environnements hostiles sur Terre est essentielle pour comprendre les conditions auxquelles la vie peut s'adapter, et pour avancer dans notre évaluation de la possibilité de vie ailleurs dans le système solaire, comme sur Mars ou bien encore Europe, une lune de Jupiter recouverte de glace. Malgré cela, de nombreuses questions demeurent sans réponse concernant ce phénomène naturel mystérieux, ouvrant ainsi la voie à de futures recherches passionnantes.

En attendant, les Blood Falls continueront d'émerveiller et d'intriguer les chercheurs et les amateurs de nature du monde entier.

Références bibliographiques :

  • Ohio State University, "Explanation Offered For Antarctica's 'Blood Falls'", ScienceDaily, 03 Nov 2003. URL 
  • Jackie Grom, "Ancient Ecosystem Discovered Beneath Antarctic Glacier", Science, 16 Apr 2009. URL 
  • Jill A. Mikucki, Ann Pearson, David T. Johnston, Alexandra V. Turchyn, James Farquhar, Daniel P. Schrag, Ariel D. Anbar, John C. Priscu et Peter A. Lee, "A contemporary microbially maintained subglacial ferrous 'ocean'", Science, vol. 324, no 5925, 2009.
  • Amal Jos Chacko, "Scientific breakthrough unveils the mystery behind Antarctica’s blood falls", Interesting Engineering, 02 Jul 2023. URL